Production directe d'o-xylène à partir de BTEXs à six composants en utilisant un cadre métal-organique interconnecté par des canaux-pores

Contexte académique

Dans l’industrie chimique, la séparation des dérivés du benzène constitue un procédé crucial et très complexe. Le benzène (benzene), le toluène (toluene), l’éthylbenzène (ethylbenzene) ainsi que les isomères du xylène (o-xylene, m-xylene, p-xylene) se retrouvent généralement sous forme de mélanges issus de l’industrie pétrolière, collectivement appelés BTEXs. Parmi eux, l’orthoxylène (o-xylene, OX) est une matière première clé pour la fabrication de l’anhydride phtalique, avec une demande mondiale qui devrait dépasser 4,3 milliards de dollars américains en 2025. Cependant, à ce jour, la principale méthode industrielle de séparation de l’OX repose sur la distillation fractionnée, un procédé énergivore et peu respectueux de l’environnement. En raison de la très grande proximité des points d’ébullition de l’OX et des autres BTEXs, la distillation nécessite un très grand nombre de plateaux théoriques et un taux de reflux élevé afin d’obtenir un OX de grande pureté.

Pour relever ce défi, les scientifiques cherchent des méthodes de séparation plus efficaces et plus écologiques. Les structures métalliques-organique (Metal-Organic Frameworks, MOFs) sont considérées comme des matériaux idéaux pour remplacer les procédés de distillation, grâce à leur taille de pore et leur chimie de surface modulables. Néanmoins, les MOFs existants manquent souvent de sélectivité en adsorption suffisante pour séparer l’OX des autres BTEXs, en particulier dans le cas de la séparation OX/éthylbenzène (EB) puisque leurs moments quadripolaires et polarizabilités sont très similaires.

Origine de la recherche

Cet article, intitulé « Direct Production of o-Xylene from Six-Component BTEXs Using a Channel-Pore Interconnected Metal-Organic Framework », a été rédigé par Xiao-Jing Xie, Heng Zeng, Yong-Liang Huang, Ying Wang, Qi-Yun Cao, Weigang Lu et Dan Li. Les membres de l’équipe de recherche sont affiliés à l’École de chimie et de science des matériaux de l’Université Jinan et au Département de chimie du Collège médical de l’Université de Shantou, en Chine, entre autres institutions. L’article a été publié le 13 mars 2025 dans la revue Chem, DOI : 10.1016/j.chempr.2024.10.006.

Processus et résultats de la recherche

1. Synthèse et caractérisation du matériau

L’équipe de recherche a d’abord synthétisé un matériau MOF appelé JNU-2. Le JNU-2 est une structure métallique-organique à pores et canaux interconnectés, dont la taille des pores a été précisément contrôlée, permettant l’exclusion totale des molécules d’OX tout en adsorbant massivement les autres BTEXs. La pureté de phase et la porosité de JNU-2 ont été confirmées par diffraction des rayons X sur poudre (PXRD) et adsorption d’azote. L’analyse par diffraction des rayons X sur monocristal (SCXRD) a par ailleurs montré que la structure du squelette de JNU-2 demeure stable avant et après activation, attestant ainsi d’une stabilité chimique remarquable.

2. Test des performances d’adsorption

L’équipe a mené des expérimentations d’adsorption en phase gazeuse, mesurant individuellement la capacité d’adsorption de JNU-2 pour le benzène, le toluène, l’éthylbenzène, l’orthoxylène, le métaxylène et le paraxylène. Les résultats ont montré que l’adsorption de l’OX par JNU-2 était quasi nulle, tandis que celle des autres BTEXs était significativement plus élevée. Par exemple, sous 353 K et 0,8 kPa, la capacité d’adsorption de JNU-2 atteignait respectivement 341 mg/g (MX), 344 mg/g (PX), 319 mg/g (EB), 307 mg/g (TOL) et 232 mg/g (BZ).

3. Expérimentations d’adsorption compétitive

Afin d’évaluer le potentiel de JNU-2 pour séparer l’OX des autres BTEXs, des expériences d’adsorption compétitive ont été réalisées. Les résultats montrent que la sélectivité d’adsorption de JNU-2 pour PX/OX, EB/OX, MX/OX, TOL/OX et BZ/OX atteint respectivement 261, 272, 100, 83 et 27. Ces résultats démontrent que JNU-2 permet une séparation efficace de l’OX avec les autres BTEXs en phase gazeuse.

4. Expériences d’extraction en phase liquide

Pour inspirer le potentiel d’application pratique de JNU-2, des expériences d’extraction en phase liquide ont été conduites. Dix grammes de JNU-2 ont été immergés dans 18 ml d’un mélange BTEX contenant 90 % d’OX et, après 24 heures d’agitation à température ambiante, le liquide a été récupéré sous vide. Les résultats montrent que JNU-2 peut extraire directement de l’OX de haute pureté à partir du mélange BTEXs, en obtenant en moyenne 15,2 ml d’OX par cycle, avec une pureté supérieure à 99,5 % et un taux de récupération de 94 %. De plus, même après un reflux de BTEXs pendant 30 jours, JNU-2 conserve son intégrité structurelle, ce qui prouve encore son intérêt pour un usage industriel.

5. Études sur la cinétique de diffusion

Pour quantifier la cinétique d’adsorption de JNU-2, l’équipe a utilisé le modèle à force motrice linéaire (LDF) pour ajuster les données expérimentales et estimer les constantes de vitesse de diffusion. Les résultats montrent que JNU-2 a des constantes de diffusion pour PX, EB, MX, TOL et BZ nettement supérieures à celles d’autres matériaux d’adsorption tels que la zéolite ZSM-5 et le Co-MOF-74, confirmant son efficacité dans la séparation industrielle par adsorption.

Conclusion et signification

Cette étude rapporte un nouveau type de matériau MOF avec canaux et pores interconnectés, JNU-2, dont les dimensions de pore finement contrôlées permettent de produire directement de l’OX de haute pureté à partir d’un mélange de six composants BTEXs. JNU-2 possède non seulement une excellente sélectivité d’adsorption et une grande capacité, mais il affiche aussi des performances remarquables de purification de l’OX lors d’expériences d’extraction en phase liquide. En outre, JNU-2 conserve son intégrité structurelle après de longs cycles de reflux, soulignant ainsi son potentiel pour une application industrielle.

Cette étude propose une nouvelle approche pour la conception de matériaux tamis moléculaires efficaces et écologiques, avec l’espoir de séparer les composés chimiques de façon plus économe en énergie dans l’industrie chimique. La réussite de JNU-2 peut réduire sensiblement la consommation énergétique dans la séparation de l’OX, tout en diminuant l’impact environnemental, ce qui a une importance tant scientifique que pratique.

Points forts de la recherche

  1. Production directe d’OX de haute pureté : JNU-2 permet d’obtenir directement de l’OX de haute pureté (>99,5 %) à partir d’un mélange de six composants BTEXs.
  2. Sélectivité d’adsorption record : JNU-2 présente une sélectivité d’adsorption pour les autres BTEXs nettement supérieure à celle des matériaux existants, notamment pour la séparation PX/OX et MX/OX.
  3. Performance remarquable lors des expériences d’extraction liquide : JNU-2 démontre une excellente capacité à purifier l’OX lors des expériences d’extraction en phase liquide, avec un taux de récupération atteignant 94 %.
  4. Excellente stabilité structurelle : JNU-2 conserve son intégrité structurelle même après 30 jours de reflux dans les BTEXs, démontrant son potentiel pour une application industrielle.

Informations complémentaires pertinentes

L’équipe de recherche a également utilisé la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT) pour simuler et calculer l’énergie de liaison de JNU-2 avec les différentes molécules BTEXs, ce qui permet d’expliquer l’origine de sa sélectivité en adsorption. En outre, la méthode de synthèse de JNU-2 est simple et adaptée à une production à grande échelle, facilitant ainsi son application industrielle.

Cette recherche apporte non seulement une nouvelle solution pour la séparation efficace de l’OX, mais offre aussi des références précieuses pour le développement d’autres matériaux tamis moléculaires similaires.